Créer du lien grâce à une estime de soi solide

On pense que la qualité d’une relation dépend de l’autre. Et si elle dépendait d’abord de la façon dont on se traite soi-même ?

Créer du lien, c’est une des choses les plus naturelles… et les plus difficiles à la fois. On a tous vécu ces relations qui coulent de source, fluides, nourrissantes, simples. Et d’autres, à l’inverse, qui semblent constamment chargées de malentendus, de tensions ou de non-dits. Pourtant, dans chaque interaction humaine, un mécanisme profond est à l’œuvre : la manière dont on se perçoit soi-même impacte directement la façon dont on entre en relation avec l’autre.

Il ne s’agit pas ici d’une énième injonction à “s’aimer soi-même pour aimer les autres”. Ce qui est proposé ici, c’est un regard précis, ancré dans deux approches puissantes du développement personnel : celle de Carl Rogers, avec sa notion de congruence, et celle de Nathaniel Branden, avec les fondements de l’estime de soi.

À travers cet article, nous explorons ensemble un levier souvent sous-estimé des relations humaines : la qualité du lien qu’on entretient avec soi-même. Car oui, c’est bien là que tout commence. Plus on est solide en soi, plus on peut être fluide, sincère et serein avec les autres.

L’estime de soi : bien plus qu’un simple sentiment positif

On confond souvent estime de soi et confiance en soi. Pourtant, ce ne sont pas des synonymes. La confiance en soi, c’est croire en sa capacité à faire quelque chose. L’estime de soi, elle, va plus loin : c’est la manière dont on se considère, en tant qu’être humain. C’est ce socle invisible sur lequel reposent nos choix, nos réactions, nos relations. Elle englobe à la fois la perception de sa propre valeur et le sentiment d’être capable de faire face à la vie.

Nathaniel Branden, psychothérapeute américain et pionnier dans l’étude de l’estime de soi, en a fait le cœur de son travail. Pour lui, il ne s’agit pas d’un trait de personnalité figé, mais d’une construction intérieure continue. Il parle d’une “expérience fondamentale” qui influence profondément notre façon d’être en relation. Ce n’est ni de l’arrogance, ni de l’égo surdimensionné. C’est au contraire une manière saine de se tenir face au monde, avec lucidité et respect de soi.

Nathaniel Branden

Branden identifie plusieurs pratiques fondamentales qui nourrissent cette estime : être conscient de soi, agir avec intention, reconnaître sa responsabilité, affirmer qui l’on est, rester intègre et s’ouvrir au changement. Ces pratiques ne sont pas des outils magiques, mais elles ont un point commun : elles nous invitent à vivre de l’intérieur vers l’extérieur, au lieu d’attendre que le monde nous renvoie une image positive pour exister.

Une estime de soi solide ne signifie pas qu’on se sent bien tous les jours. Cela signifie qu’on sait, même dans le doute ou la difficulté, qu’on a de la valeur. Et cette certitude intérieure change tout dans la relation à l’autre. On n’a plus besoin de chercher sans cesse à être validé, reconnu, rassuré. On peut alors entrer en lien non pas pour combler un manque, mais pour créer quelque chose ensemble.

La congruence : l’alignement qui donne confiance

Carl Rogers

Carl Rogers, figure emblématique de la psychologie humaniste, a profondément marqué l’approche des relations interpersonnelles avec un concept-clé : la congruence. C’est un mot qu’on entend peu en dehors des cercles spécialisés, mais son impact dans la vie quotidienne est immense.

Être congruent, c’est être aligné. C’est faire coïncider ce qu’on ressent, ce qu’on pense et ce qu’on exprime. Pas besoin d’être parfait ou toujours sûr de soi. Il s’agit simplement de se montrer tel que l’on est, sans masque ni stratégie. Quand il y a un écart entre ce qu’on vit intérieurement et ce qu’on montre à l’extérieur, ce décalage finit par créer de la tension – pour soi d’abord, puis pour l’autre.

Dans la relation, la congruence est perçue comme une forme de sécurité. Quand on est à quelqu’un de congruent, on le ressent immédiatement : il ne joue pas un rôle, il n’essaie pas de plaire à tout prix, il n’a pas besoin de se justifier sans cesse. Il est là, simplement, en présence. Et ça donne envie d’entrer en lien.

À l’inverse, quand on sent que l’autre n’est pas aligné, même sans pouvoir l’expliquer, quelque chose bloque. On perçoit une forme de flou, d’instabilité, qui rend la relation moins fluide. Ce décalage peut venir de la peur d’être jugé, du besoin d’être aimé, ou d’un manque de clarté intérieure. Et c’est là que l’estime de soi entre en scène.

Plus une personne se sent légitime dans ce qu’elle est, plus elle peut se permettre d’être congruente. Elle ne cherche pas à cacher ses failles ni à se faire passer pour ce qu’elle n’est pas. Elle assume, elle ajuste, mais elle ne triche pas. Cette authenticité n’est pas toujours confortable, mais elle est profondément rassurante pour ceux qui la côtoient.

Ce que ça change dans la relation à l’autre

Quand on est bien avec soi, on n’a plus besoin de jouer un rôle. La relation à l’autre devient alors un vrai espace de rencontre, et non un terrain d’épreuve. On ne cherche plus à être validé, compris à tout prix, ou aimé coûte que coûte. L’autre cesse d’être un miroir de notre valeur : il devient un partenaire, un interlocuteur à part entière. A ce propos, mon article sur l’effet miroir pourrait vous être utile.

C’est cette posture intérieure qui change tout. Une estime de soi solide permet d’écouter sans se sentir menacé, d’affirmer sans dominer, de poser ses limites sans culpabiliser. Elle offre un cadre intérieur stable, depuis lequel on peut être soi — vraiment — dans la relation.

Et ce n’est pas une utopie. C’est visible, chaque jour, dans les interactions les plus simples. Un vendeur qui ne force pas, mais qui écoute vraiment. Un manager qui n’a pas besoin d’imposer pour être respecté. Ce ne sont pas leurs techniques qui créent le lien, mais leur état intérieur, leur alignement, leur congruence.

Tout cela se cultive. L’estime de soi n’est ni innée ni figée : elle se construit, se travaille, se nourrit au quotidien. Branden parle d’un engagement actif envers soi-même : apprendre à se connaître, à se parler avec honnêteté, à s’affirmer sans écraser. Ce n’est pas se replier sur soi. C’est, au contraire, préparer le terrain pour être pleinement présent à l’autre.

Plus on est solide en soi, plus on peut créer des relations vraies. Des liens où l’on respire. Des liens où l’on peut être sans jouer. Et c’est cette qualité de présence qui rend la relation non seulement possible, mais précieuse.

Une femme fait un coeur avec ses mains au soleil couchant

On croit souvent que la qualité des relations dépend de l’autre, de sa capacité à écouter, à comprendre, à s’ajuster. En réalité, tout commence beaucoup plus près de nous. La relation que l’on entretient avec soi-même est la première brique, parfois invisible, de tous les liens que l’on construit.

Une estime de soi nourrie, consciente, stable, offre un socle pour entrer en relation sans se perdre, sans se suradapter, sans écraser. Elle permet cette fameuse congruence chère à Carl Rogers : le droit d’être pleinement soi, tout en étant pleinement avec l’autre. Et c’est précisément dans cette authenticité partagée que naissent les relations les plus profondes, les plus fluides, les plus durables.

Il ne s’agit pas de devenir invulnérable ou parfait. Il s’agit de devenir vrai. D’apprendre à se connaître, à s’accueillir, à se respecter, pour pouvoir faire de même avec ceux qui nous entourent. Ce n’est pas un luxe. C’est une nécessité si l’on veut créer du lien, du vrai. Et c’est une compétence. Donc, ça se travaille.

Alors la prochaine fois qu’une relation coince, plutôt que de chercher tout de suite ce qui ne va pas chez l’autre, posez-vous peut-être cette question : est-ce que je suis vraiment en lien avec moi-même, ici et maintenant ? Parce que c’est souvent là que tout se joue.

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Emmanuelle Ossola Créatrice de lien(s)
Techniques de vente Formation professionnelle Coaching en entreprise Mentorat
Education: École Professionnelle Commerciale de Lausanne, Université Ouvrière de Genève, L'Académie Zéro Limite, Ludovic Leroux - Pleine Confiance

De libraire à formatrice et maintenant auteur, j'ai transformé chaque défi en tremplin. Aujourd'hui, j'accompagne les talents en Suisse romande, propulsant vendeurs et professionnels vers leur meilleure version d'eux-mêmes.

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